STRAVA : que se cache-t-il derrière le “réseau social du seuil” ?
Si vous suivez le Tempo Run Club de façon assidue vous avez sûrement dû voir passer le mot « Strava ». Est-ce encore un terme issu du jargon fleuri du TRC ? Que nenni, Strava est une application très intéressante et utile pour les coureurs en tout genre, avec une préférence tout de même assez marquée pour les coureurs de demi-fond, de fond, les cyclistes et les triathlètes. En bref, pour les seuillards (NDLR : a-t-on vraiment besoin de réexpliquer ce que c’est ?). Dans l’article à suivre, nous allons analyser les différentes facettes de ce réseau social, connu sous le surnom de « facebook des sportifs » ou d’ «instagram du seuil », son histoire, ses spécificités, son mode d’utilisation ainsi que des anecdotes surprenantes à son sujet.

1) L’origine de Strava
La version officielle voudrait que cette application soit née en Californie à San Francisco, de la main de deux anciens élèves de Harvard au départ assidus d’aviron et de cyclisme. L’application était à l’origine dévolue aux deux roues, avant de s’exporter, face aux nombre croissant de triathlètes utilisant l’application, à la course à pied et à la natation. La version officieuse voudrait, elle, que Strava ait été créée par des adeptes d’une secte connue sous le nom d’église de Seuillologie, regroupant notamment des membres célèbres comme le champion du monde de duathlon Benoit Nicolas, qui auraient élaboré cette application dans des laboratoires secrets situés en Bretagne, au bois de Keroual. Tout ceci dans le but de convertir de nouvelles personnes à leurs pratiques occultes consistant majoritairement à courir un nombre incalculable de kilomètres par semaine. Cette version ne reposant sur aucun document officiel, nous ne l’étayerons pas.En suédois Strava signifie « s’efforcer à faire quelque chose sans relâche », un credo qui nous convient parfaitement au sein du Tempo Run Club, puisqu’un de nos objectifs principaux est de promouvoir le goût de l’effort et les vertus de l’abnégation. Nous tenons néanmoins à souligner qu’à l’heure actuelle le TRC ne dispose d’aucun contrat de sponsoring avec Strava, que ceci n’est pas non plus à l’ordre du jour, et que nous effectuons donc ici une revue objective et satirique, sans la moindre volonté de faire une quelconque campagne publicitaire envers une entreprise.Depuis sa création en 2009, Strava est devenue peu à peu incontournable dans les milieux athlétiques et regroupe aujourd’hui un peu plus d’1 million de membres. Ce chiffre est néanmoins à prendre avec des pincettes, étant donné que la firme californienne ne communique que très peu sur ses données financières (comme de nombreuses start-up de la Silicon Valley) et sur son nombre d’utilisateurs… Préférant donner des informations sur le nombre de kilomètres parcourus par ses membres chaque année, ou offrant un récapitulatif des performances athlète par athlète, sans apporter de vision d’ensemble. Le seuil avant l’argent.Nous pouvons néanmoins affirmer aujourd’hui que parmi les cinq grandes applications de running existantes, à savoir Runkeeper, Nike+, Runtastic et Endomondo, Strava se positionne comme challenger, de part ses origines plutôt centrées sur le cyclisme. Cela devrait néanmoins changer prochainement, avec les efforts fournis par l’entreprise pour se renforcer dans le secteur de la course à pied, et par sa particularité d’être un réseau social avant d’être une simple application de sport. Il faut également souligner que contrairement à ses concurrents, Strava n’appartient pas à une marque de textiles sportifs (avant un rachat par le TRC ?)
2) Un réseau social de sportifs
Qui dit réseau social, dit nécessairement influenceurs. Sur Strava pas de likes mais des « kudos » (NDLR : la différence est minime, le symbole du kudo étant un pouce levé et « kudos » signifiant selon Google Traduction « gloire » en anglais), que certains « Stravanautes » (NDLR : nom nul désignant les utilisateurs de Strava) recherchent activement. La question que l’on peut maintenant légitimement se poser est : comment devenir un influenceur Strava ? La première réponse est simple : il vous faudra borner. On l’a déjà dit, ce réseau social est plutôt l’apanage des seuillards, présents en nombre dans la communauté des Stravanautes. Satistiquement, les athlètes réalisant le plus de likes sont donc ceux qui courent le plus, le plus longtemps. Mais ce n’est pas tout. Pour en savoir plus, nous sommes allés à la rencontre d’un influenceur Strava français, Fabien Prigent, récemment auteur d’une performance unique : atteindre le chiffre incroyable de cent kudos sur une sortie. Il nous a expliqué comment il est arrivé à susciter autant de « buzz » autour de ses activités : « C’est assez simple en fait, comme vous l’avez dit beaucoup borner est important mais ça ne suffit pas. Moi par exemple, je ne mets pas toutes mes sorties en public sur Strava, j’en cache certaines. Parce qu’elles ne sont pas intéressantes pas parce que je ne veux pas divulguer mon entraînement, je ne fais pas partie de ces fantômes qui regardent tout mais ne synchronisent rien. Il faut que votre activité soit marquante, par exemple avec un gros pic d’allure. Je prends ici l’exemple de mon ami Vincent Kermarec qui sur une séance de VMA type 12x300m va systématiquement mettre une grosse giclette sur le dernier. Sur sa courbe d’allure c’est marquant, clairement ça impressionne et ça plait. Me concernant j’aime bien mettre des titres d’activité marrants, le « course à pied le soir » par défaut très peu pour moi ! Décrire sa séance c’est un minimum, une photo c’est un plus non négligeable pour les Kudos, encore plus avec une tenue athlétique appropriée. Ici une casquette TRC c’est l’équivalent d’une Rolex sur Instagram. »

Savoir s’entourer est également important, comme le souligne Prigent : « Je cours souvent avec les seuillards de la team Lenglen. Des types qui peuvent faire 20 fois 1000m à 3’15 un dimanche matin, sur le segment le plus utilisé de France, forcément ça fait parler.» Si l’on veut résumer, la clé de la réussite serait donc un mélange de bornes, mais aussi de vitesse : « une sortie de 20 kilomètres avec 5 kilomètres à 3’00, c’est le buzz assuré » nous confie ainsi le finaliste des championnats de France de 3000m steeple Maël Sicot. « La vitesse y a toute sa place, ajoute Vincent Kermarec, avec le système de KOM (NDLR : King of the mountain, roi de la montagne), qui classe toute personne ayant emprunté un segment de l’application, il existe une vraie compétition interne, qui pousse à aller le plus vite possible afin du s’emparer du titre. Pour certains, un KOM vaut une médaille olympique, c’est un titre de noblesse chez les seuillards. »L’humour y a également sa place : « J’essaye souvent de faire des tracés GPS marrants, par exemple une mini carte de France. Ca marche pas mal. » ajoute Benjamin Raffard, président du TRC et grand adepte de Strava. « C’est une communauté particulière, pour peu qu’on sache bien l’utiliser, qu’on fasse régulièrement des sorties à moins de 5 minutes au kilo de moyenne, on peut rencontrer du monde » ajoute ce dernier, sourire en coin, ce qui nous amène à notre point suivant : Strava est-il un site de rencontre pour les seuillards ?
3) Strava comme site de rencontre de seuillards
Les gens normaux ont Meetic, Adopteunmec, Eliterencontre, Tinder etc… Mais avez-vous remarqué qu’il est strictement impossible sur ces sites de rencontre de régler sa préférence sur les seuillards ? Comment en effet expliquer que l’on recherche quelqu’un qui borne au moins dix kilomètres par jour ? Ces sites n’ont pas pensé à ceux qui passent le plus clair de leur temps libre runnings au pied à arpenter les tartans. Mais sur Strava il est possible de trouver l’élu de son cœur partageant sa passion pour la course à pied ! Combien de personnes n’ont-elles pas rencontré leur moitié au détour d’une séance de fartlek ou d’une sortie longue ? La possibilité de voir qui a emprunté les mêmes itinéraires GPS que vous est un vrai plus pour faire des rencontres entre personnes aimant le seuil. Un premier rendez-vous au stade Max Rousié de Clichy n’est-il pas plus romantique qu’une sortie ciné ? Nous sommes d’accord. Le problème intervient au moment de la période de séduction, quand le seuillard, prêt à tout pour impressionner ses congénères, va prendre des risques inconsidérés.

4) Témoignage « j’ai failli mourir pour un KOM »
Anthony Pronost (NDLR : les prénoms et noms ont été changés), en tremble encore. Il y a un peu plus d’un an, pour impressionner une Stravanaute repérée sur un tracé GPS lors d’un footing, « AP », après avoir étudié en détails le profil de l’intéressée, se met en tête de prendre le KOM sur lequel s’entraîne le plus la belle. « C’était une côte dans un quartier résidentiel, je me disais qu’il me suffirait de gicler comme sur un départ de 800m pour le prendre… » Lancé à pleine vitesse, « AP » ne voit pas que le tracé du segment traverse une route départementale, et manque de peu de se faire renverser par un poids lourd. Le danger est donc bien réel. Prêts à tout pour aller chercher des KOM, dans un remake des batailles napoléoniennes, les stravanautes vont jusqu’à mépriser leur propre sécurité afin de régner dans les sommets de ces classements virtuels, qu’idéologisent l’application. Celle-ci fait tourner la tête de certains et le TRC invite à la prudence : ça ne vaut pas la peine de risquer votre vie pour une couronne virtuelle, « d’autant plus que si vous me piquez un KOM je vous flagguerai! » ajoute d’un ton véhément Anthony Pronost. Le « flag » c’est l’outil préféré d’ « AP », véritable policier du réseau, « Je serais un policier si leurs uniformes étaient des Nike », qui se charge de dénoncer aux serveurs de Strava qu’un athlète malintentionné a trafiqué sa sortie ou son GPS pour gagner un KOM. Utiliser un vélo et synchroniser la sortie en mode « course à pied » est un grand classique de ces odieux tricheurs, prêts à tout pour régner dans les classements. Mais certains, plus astucieux, regorgent d’idées pour surévaluer leurs performances : arrêts manuels de la montre et reprise immédiate pour gagner quelques mètres (NDLR : uniquement réalisable sur des montres Polar), modification de segments, piratage informatique des satellites américains stockant les données GPS, tous les moyens sont bons pour être devant ses partenaires.
Si cet article vous a plu et que vous voudriez rejoindre la team TRC sur Strava, rien de plus simple ! L’application est disponible sur Android et AppStore et la configuration avec votre montre GPS est aisée, pour plus d’informations suivez ce lien : http://www.lerunnergeek.fr/synchroniser-ses-courses-entre-garmin-connect-strava-runkeeper-et-autres/